Le Modèle oublié, le nouveau roman de Pierre Perrin
VILLAGES FM : Pourquoi ce roman ?
Pierre Perrin : Le roman m’a paru nécessaire pour rendre à Courbet ses amours et une épaisseur humaine, pleine de contradictions. La plupart de ses biographes séparent l’œuvre de la vie du peintre. Or c’est rendre unijambiste cet être passionné que de ne pas lui reconnaître d’avoir aimé d’autres femmes que les sempiternelles lorettes. Virginie Binet l’accompagne onze ans de sa vie jusqu’à la gloire ; elle lui donne un fils, qu’il peint au demeurant. Tout le monde dit reconnaître ce fi ls, Émile, dans Les Cribleuses de blé. Pourquoi cacher ou ignorer cette part vive de Courbet ? Le peintre écrit pourtant à plusieurs reprises combien il a souffert l’arrachement. J’ai voulu rendre avec Le Modèle oublié, un hymne à la vérité et à Courbet, les deux jambes qui lui ont permis de lever haut son existence.
VILLAGES FM : Vous avez beaucoup appris à étudier Courbet ?
Pierre Perrin : Certains voudraient en faire un généreux martyr d’une seule pièce, pauvre, persécuté, proscrit, ruiné. Or, comme tout individu, il relève de la plus grande complexité humaine : anticlérical, il aura passé sa vie dans deux ateliers-églises (89 rue de la Harpe, puis 32 rue Hautefeuille à paris) et privilégié sa famille très imprégnée de catholicité ; sa petite sœur s’était engagée tertiaire dans l’ordre de Saint-François.
Haïssant tout pouvoir, toute hiérarchie, il n’aura rêvé que d’écraser tous les peintres, ses confrères. Il se disait socialiste, mais il est resté insensible dans les faits à l’égalité des fortunes, la sienne au premier chef. Il a toujours apprécié, recherché le luxe et la compagnie des nobles : Baudry en Saintonge, le Comte Choiseul en Normandie. Il est contre Napoléon III, mais il fréquente assidûment son demi-frère Morny, qui lui achète des tableaux, puis le comte de Nieuwerkerke. Il aura peu aimé, rien su garder, ni sa compagne durant onze ans, ni son fi ls, ni Laure Boreau, ni Johanna Hifferman, ni les amitiés de Baudelaire, de Champfleury et de tant d’autres. Et pourtant il aura galvanisé l’attention, l’affection de certains, dont Baudry, Castagnary… Un phénomène !
VILLAGES FM : Ce roman, c’est le fruit d’un travail de titan !
Pierre Perrin : J’évalue à mille cinq cents heures, au moins, le travail accompli, mais le plaisir du roman les vaut bien. Je me suis d’abord rendu à Dieppe pour situer les lieux où Virginie puis Émile ont vécu. J’ai collecté leurs actes d’état civil, rassemblé des archives, relu surtout la correspondance de Courbet, achetée à sa parution en 1996, ainsi qu’une soixantaine d’ouvrages consacrés au peintre d’Ornans. J’ai progressé par intuitions qu’aucune lecture n’a infirmées à ce jour.
Retrouvez en podcast l’intégralité de l’interview = ICI
Pierre Perrin sera en dédicace :
- Samedi 6 avril, 15 heures, L’Esperluète, 5 rue Vannolles, pour la librairie Rousseau, 25300 Pontarlier
- Mercredi 10 avril, 19 heures, présentation-signature à la Librairie Gallimard, 15 bd Raspail, 75007 Paris
- Samedi 13 avril, 15 heures, Librairie Guivelle, 7 place de la liberté, 39000 Lons-le-Saunier
- Samedi 20 avril, Valérie Barbe Librairie Brouillon de culture, 29 rue Saint-Sauveur 14000 Caen
- Samedi 27 avril, 16 heures, librairie La Passerelle [avec D. Sosoli¢, graveur], 16 bis rue de la Sous Préfecture, 39100 Dole
- Dimanche 5 mai, en après-midi à la librairie du Musée Courbet à Ornans (entrée libre et gratuite)
- Samedi 11 mai, 15 heures, Librairie L’Intranquille, 25000 Besançon
- Dimanche 19 mai, [dans le cadre de la nuit des Musées] Musée Courbet, 25290 Ornans
- Vendredi 24 mai, 14 heures, Le Café littéraire luxovien, Centre Social Saint Exupéry, 5 bis av. de Lattre de Tassigny 70300 Luxeuil-les-Bains
- […]
- Samedi 12 octobre, Maison de la Poésie, 86000 Poitiers [dans la Vienne]
Autres dates sur http://perrin.chassagne.free.fr
Le Modèle oublié
« Que reste-t-il du premier grand amour de Gustave Courbet, Virginie Binet, une douce Dieppoise qui l’accompagna vers la gloire pendant plus de dix ans et du fi ls qu’elle lui donna ? Rien, presque aucune trace. Toute la correspondance amoureuse de Courbet a été détruite. Il faut aller chercher sous les couches de peinture, comme dans L’Homme blessé où Gustave effaça l’aimée, scruter les détails des tableaux pour distinguer, parfois, une silhouette perdue…
Virginie, modèle abandonné, et le petit Émile ressuscitent entre ces pages. Des appartements parisiens où ils vivent avec Courbet, taraudé par sa quête du succès, on entend le vacarme du XIXe siècle, celui des barricades, coups d’État, émeutes, répressions, débats où résonnent les voix de l’ami Baudelaire, de Flaubert, Proudhon, Champfleury, Gautier ou Victor Hugo, vibrant aux funérailles de Balzac.
On n’aura jamais été aussi proche du peintre que dans ce roman où il est saisi dans les yeux d’une femme. Comme par enchantement, ses toiles les plus célèbres s’éclairent soudain d’un jour nouveau, passionnant.» [Emmanuelle Delacomptée]
Aux éditions Robert Laffont
Format : 125 X 220 mm – 234 pages.
Prix : 20 euros
Une critique littéraire sur le site Critiques Libres
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LES CRITIQUES :
Permettez-moi de vous faire compliment. Beaucoup de trouvailles stylistiques, de l’astuce dans le récit, de l’élégance dans le propos et une sorte de suspens qui pousse à la poursuite de la lecture. […] les événements historiques sont parfaitement liés à votre évocation. Ils ne sont jamais plaqués ni indigestes. Bravo, ça c’est du métier et de la belle ouvrage ! — Jean-François Solnon [historien, Catherine de Médicis, Henri III, Louis XIV, entre autres, aux éditions Perrin, président du prix Lucien Febvre – courriel, 28 mars 2019]
J’ai beaucoup aimé votre livre, Pierre, et cet homme qui voulait vivre goulûment. Très beau portrait de femme en effacée, discrète présence pleine de tendresse. Quel travail ! Je vous souhaite le meilleur pour ce très beau texte fin et élégant d’un classicisme remarquable. — Ariane Bois, auteur de neuf romans dont L’Île aux enfants, 31 mars, à 13 h 38
Votre roman est un récit, et ce récit a du roman la vie, la verve, la vue, les couleurs, la sensibilité, la présence des acteurs ; on y plonge, on y est, on ne lâche jamais le fil, on se confond avec les êtres, avec l’époque, avec l’art. Parfaite maîtrise de la narration, des faits, du climat général. […]Dire de votre Courbet que c’est un joyau est banal, mais là, prenez le terme en sa vérité. Pas un mot de trop, pas une phrase qui ne résonne, rien ne manque, tout vibre, tout prend, tout emporte, tout se vit. Maîtrise absolue : sachez que pour moi, en matière d’écriture, il n’est pas plus bel hommage. — Jean-Michel Delacomptée, [vingt ouvrages, Gallimard, Fayard] le 20 avril 2019
Pierre Perrin, dans son roman, va vous guider dans les arcanes de cette création et de la vie de Courbet. Son style précis, solide, sensuel, inventif quand il le faut, vous rend l’explication agréable au fil des chapitres bien enchaînés. Un livre qui s’appuie par ailleurs sur une liste de documents impressionnante, ce qui ne gâche rien. […] c’est un livre réussi, qui vous entraîne et vous pousse à tourner les pages. Et qui sait aussi, et ce n’est pas la moindre de ses qualités, vous faire douter sur l’homme Courbet. […] Raison de plus de lire ce roman lucide et batailleur de Pierre Perrin, qui est un « pays » de Courbet. — Jean Pérol, poète, romancier chez Gallimard et La Différence, 26 avril 2019
Pierre Perrin a mené l’enquête à Dieppe et s’est attaché avec succès à reconstituer un puzzle par nature complexe. Sous la plume de l’écrivain, les blancs se comblent grâce à la fiction, la nature même du roman y invite. Mais l’auteur s’est si ardemment imprégné de ses personnages, il s’est si sérieusement pénétré des tableaux peints par Courbet que le lecteur pressent combien cette fiction tangente, au fil des chapitres, ce qui dut être une partie de la réalité. […] Cette fréquentation des experts de Courbet, alliée à de réelles qualités de plume, rendent ce roman vivant, les récits d’atmosphère convaincants. — Thierry Savatier, historien d’art, 08 mai 2019 sur son blog adossé au Monde.